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Synopsis

 

C. a 15 ans. Au cœur de l’été, dans la vibration des corps et des mots qui cherchent leur liberté, les rapports inconscients d’un trio familial qui se prépare à un événement. Un événement qui cristallisera les conflits internes de chacun…

 

 

Extrait

 

1- Dans la forêt, la nuit

 

La forêt est noire, profonde, silencieuse. Seule une légère brise vient remuer le feuillage de la végétation. Un premier coup de feu. Sec, retentissant. Une onde de choc qui brise l’air, venant se cogner et rebondir sur les couches d’humus, l’écorce des arbres. Un deuxième coup de feu, plus proche, étouffé cette fois plus rapidement par la terre qui semble avoir englouti la fureur dans un grondement grave. Le tir s’éteint dans la nuit comme le dernier éclair avant la pluie. L’air est à présent plus lourd, épais. Un bourdonnement d’abeilles qui monte. Un cri d’oiseau, bientôt accompagné par d’autres, commence à former un brouhaha dissonant. Une silhouette se dessine en contre-jour d’une lumière bleue sombre qui perce l’épaisse forêt. L’ombre court à toute allure puis disparaît dans la nuit en emportant avec elle les cris des volatiles. Au loin, les grognements ténébreux d’un animal haletant. Vision éclair d’une bête imposante traversant le cadre et s’engouffrant à son tour dans la nuit.

 

 

Note d’intention

 

 

" L'inconscient, c'est une substance à fabriquer, à faire couler, un espace social et politique à conquérir " Gilles DELEUZE et Claire PARNET, Dialogues

 

 

     « Il y eut un soir, il y eut un matin » vient d’un désir qui brûle de faire couler la narration vers des paysages mentaux. Déchirer le récit de forces vives, créer des espaces de liberté où l’image prendrait en charge les humeurs du corps, des sensations, de l’indicible et pourrait se laisser apprivoiser, l’espace d’un instant, comme pure présence à contempler, à éprouver.

        Je viens de l’expérimental. Des corps, il y en a toujours eu dans mon travail. Il y a eu le corps du cri, d’abord, comme une force sauvage. Puis il y a eu l’écriture, la voix, la puissance des mots, Duras. La voix dans la bouche du corps. Incarnée, performative, vibrante.

 

        La matière sonore devra être physique, sensorielle, avoir une véritable présence. Réminiscence : après la projection d’un film, j’ai eu la sensation d’une acuité décuplée de mes sens. Une attention particulière à la prise de son qui nous permettait de percevoir des micros détails sonores. Des gros plans sonores, réalistes dans la sensation que j’en avais eu, bien qu’impossible à entendre à l’ouïe nue. Comme le son d’un tissu qui passe sur le corps. J’aimerais que le film puisse exister si l’on a les yeux fermés, que le son soit une véritable cartographie des corps dans les espaces. Que cela puisse faire surgir la sensation d’une odeur, d’une couleur. Un son hyper-sensoriel, une loupe sonore au même titre qu’un objectif macro.

 

        L’image argentique me bouleverse. Vouloir tourner en pellicule aujourd’hui est à la fois un acte de résistance contre la plastique lisse du numérique qui désenchante le monde, mais également une méthode de travail où la part de risque et de difficulté mobilise, à mon sens, davantage les énergies. J’ai d’abord photographié en numérique. J’étais alors dans une posture de foisonnement des images, de facilité de déclenchement, d’éparpillement de la concentration. Puis je suis passée à l’argentique, aux photographies à la chambre. Ma méthode de travail et mon regard en ont été complètement bouleversés. Prendre le temps de regarder, la difficulté de mise en œuvre, penser chaque image avec une concentration accrue où chaque déclenchement est un mouvement précieux.

 

        La lumière devra se comporter comme un ruban de Möbius entre les scènes de « vie » et les scènes plus « mentales ». Le naturalisme des lumières des scènes « de vie » sera ponctué à certains moments d’un traitement plus abstrait, où les lumières devront être pensées comme des vecteurs émotionnels, le surgissement d’une intériorité. Je pense par exemple à la scène de danse à la fin. La lumière comme vecteur des métamorphoses des corps, comme le visage mutant de Romy Schneider dans l’Enfer d’Henri-Georges Clouzot. Les visages baignés dans une lumière bleue qui coule et ondoie comme des reflets d’eau sur la peau, ponctués de taches feu. Les transitions de lumière devront se faire de manière imperceptible, fluide, coulée. Le travail de montage et du cadre devra participer à cette fluidité de passage.

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